Neutralité carbone, mobilisation, investissements et projets de l’industrie cimentière

Engagés sur une ambitieuse trajectoire de décarbonation, les industriels cimentiers se sont fixés un défi de taille à relever : baisser leurs émissions de gaz à effet de serre de 90 % d’ici 2050 !

La baisse des émissions de l’industrie cimentière est un processus continu engagé depuis les années 90. Consciente des enjeux environnementaux et des objectifs de préservation de la biodiversité, l’industrie cimentière pratique une écologie industrielle qui réduit son impact sur les milieux naturels. Dans cette logique, la filière investit et développe des mesures pour se décarboner.
Quelles sont ses stratégies pour répondre et participer à l’atteinte de la neutralité carbone de la construction ?

Industrie cimentière et neutralité carbone

La neutralité carbone, c’est quoi ?

La neutralité carbone est un état d’équilibre à atteindre entre les émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine et leur retrait de l’atmosphère par l’homme ou par absorption par les puits de carbone naturels comme le sol, les forêts, les océans. La différence entre les gaz émis et extraits étant alors égale à zéro.
Concrètement, il s’agit donc de réduire les émissions et de renforcer les puits de carbone naturels et artificiels.

Pour atteindre la neutralité carbone, il faut décarboner. La décarbonation consiste à réduire les émissions des gaz à effet de serre produits lors d’un processus de fabrication. Le gaz à effet de serre le plus connu est le CO2. Il est libéré, par exemple, lors de la combustion des énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz). Emprisonné dans l’atmosphère, il intensifie l’effet de serre et participe au changement climatique.

Les origines des émissions de CO2

L’industrie cimentière émet 10 millions de tonnes de CO2. Les origines de ces émissions sont :

  • pour ⅔, les émissions liées à la cuisson du calcaire et de l’argile qui donne le clinker (qui est la base du ciment) CaCO3 > CaO + CO2
  • pour ⅓, le carbone émis est lié à l’utilisation des combustibles utilisés pour chauffer la matière à plus de 1400 °C.

Les actions pour produire moins de CO2 

La nouvelle feuille de route de décarbonation de l’industrie cimentière, présentée le 25 mai 2023 prévoit une réduction des émissions de GES de 50% d’ici 2030 et de 90 % d’ici 2050, par rapport à 2015.

Cette feuille de route fixe le cap 2023-2050 pour une industrie française du ciment décarbonée et compétitive, partie intégrante de la transition écologique. Un scénario qui s’inscrit dans une logique de sobriété : construire mieux avec moins, en mobilisant un mix plus important de matériaux durables.

Pour participer aux objectifs d’atteinte de la neutralité carbone, la filière cimentière travaille sur plusieurs leviers, qui reposent d’une part sur l’accélération des solutions de décarbonation déjà existantes et d’autre part sur le déploiement des solutions de captage du carbone inhérent à la fabrication du ciment.

La valorisation de l’énergie fatale 

Les 3⁄4 de l’énergie thermique dégagée lors du refroidissement du clinker sorti du four (la trempe) sont restituées et servent au préchauffage de la farine crue.

L’augmentation des combustibles alternatifs

Les fours de cimenterie utilisent des énergies fossiles (charbon, hydrocarbures) et alternatives pour fabriquer le clinker. Les combustibles alternatifs se substituent de plus en plus aux combustibles fossiles. En 2022, cette substitution a représenté 50% des besoins en énergie thermique. La part de ces combustibles alternatifs (déchets) sera porté à 80% dès 2030. Ce sont autant de sources de CO2 en moins.
Ces combustibles alternatifs se composent de déchets de récupération comme des huiles usagées, des pneus inutilisables, des combustibles solides de récupération (CSR), du bois traité. L’objectif est d’augmenter la part des matières organiques, la biomasse pour réduire encore plus  les émissions de gaz à effet de serre.
La réutilisation des déchets permet de les valoriser et de participer à la boucle vertueuse de l’économie circulaire.

La réduction du clinker pour un ciment bas carbone.

L’empreinte carbone des ciments est directement proportionnelle à leur teneur en clinker. En complément du clinker, il existe des matériaux qui, finement broyés peuvent participer au développement des résistances : les « matériaux cimentaires », tels que le calcaire, le laitier (sous-produit de la sidérurgie), les cendres volantes ou les pouzzolanes. Ainsi, il est possible de modifier la composition du ciment, en réduisant la teneur en clinker, sans perdre ses propriétés de résistance mécanique, tout en diminuant son empreinte carbone.
Ces ciments bas carbone ont une empreinte carbone réduite de 50 % par rapport à un ciment composé uniquement de clinker (Cem I) et de 35 % par rapport à la moyenne de tous les ciments.

La capture et la valorisation du CO2

Pour aller plus loin dans ses performances de décarbonation, l’industrie cimentière travaille sur des technologies de rupture qui consistent à capter, transporter et stocker ou utiliser le CO2.

Il est possible de capturer le CO2 dans les gaz des industries. Les technologies les plus matures pour effectuer cette séparation sont celles du lavage aux amines et de la capture par technologie membranaire. Des projets sont en cours de déploiement sur plusieurs sites industriels français.

Une fois capturé, il faut stocker ou réutiliser le CO2. Voici quelques exemples d’application :

  • Stockage dans les cavités salines profondes ou d’anciens champs pétroliers.
  • Production d’algues : projet de recherche industrielle pour valoriser le CO2 et la chaleur fatale issue de la production du ciment en assurant le développement de microalgues. Les cultures, disposées sous une serre sur le site d’une cimenterie, consomment 5 à 10 fois plus de CO2 que les plantes terrestres. Une fois à maturité, les microalgues peuvent être transformées en biocarburants ou servir de combustibles dans les chaufferies à biomasse. Un démonstrateur de 800 m2 a été installé en France.
  • FastCarb. La carbonatation est un phénomène naturel et lent par lequel le béton piège une partie du CO2 qui a été émis lors de son élaboration. Le Projet National FastCarb, en cours de finalisation, vise à accélérer cette captation en exposant du béton concassé aux flux de CO2 libérés par le process de fabrication du clinker. Deux sites pilotes ont été installés en France.

Il existe de nombreux autres projets en phase de déploiement en France et en Europe. Les industriels cimentiers sont engagés dans la recherche et le développement de ces technologies de rupture qui permettent de révolutionner l’industrie cimentière et de relever des défis ambitieux.

 

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